Racheter ma caisse de pension. Utile ou pas ?

Découvrez les cas où il est utile de racheter votre caisse de pension et les éléments auxquels prêter attention !

Alors, même si je défends vigoureusement l’idée que l’on ne peut construire son patrimoine uniquement d’un point de vue fiscal, il n’en reste pas moins que la caisse de pension est un outil massue pour défiscaliser du revenu, notamment grâce au rachat de votre caisse de pension.

Quels outils pour réduire vos impôts ?

La Suisse est assez pauvre en instruments permettant de réduire ses impôts sur le revenu.

Vous trouvez principalement le 3e pilier (dont il serait enfin temps que l’état augmente le montant maximal déductible – si le Conseil fédéral lit ce papier…) et le rachat du 2e pilier.

Si vous êtes propriétaire, vous pouvez également déduire vos travaux d’entretien courant.

Enfin, si vous détenez votre entreprise, vos dividendes peuvent être partiellement exonérés en vue d’éviter une double imposition.

Déménager dans le canton de Zoug fait bien sûr aussi partie des options intéressantes… 🙂

Quelques rappels sur le 2e pilier

Avant de répondre à la question posée, et sans entrer dans trop de « technique », il est utile de rappeler les éléments suivants :

  • Fond de pension, fond de prévoyance, caisse de retraite, caisse de pension et caisse de prévoyance désignent en général la même chose : le deuxième pilier. Une épargne que vous constituez pour votre retraite en tant que salarié. Elle fait donc partie intégrante de votre patrimoine !
  • Si vous êtes salarié, vous n’aurez que peu de chance de choisir votre caisse de pension. Elle peut donc être bonne, moyenne ou mauvaise. C’est l’employeur qui la choisit, aidé généralement par un comité d’employés.
  • L’argent que vous détenez dans votre caisse de pension n’est pas liquide, et son retrait est légalement défini : retraite légale ou cinq ans avant, achat d’une résidence principale, remboursement de dette hypothécaire, travaux dans la maison, un départ définitif à l’étranger, se mettre à son compte comme indépendant. Attention donc à ne pas faire de vos avoirs de retraite votre seule fortune, car la vie est longue avant la retraite.
  • La Loi sur la Prévoyance Professionnelle (LPP) définit un plancher et un plafond de revenus assurés. La caisse, avec l’accord de l’employeur, peut être plus généreuse que ce qui est défini dans la loi en supprimant ces barrières.
  • Lorsque vous lisez dans la presse que le taux de rémunération du capital va baisser, ou lorsque nous sommes amenés à voter sur le taux de conversion : seule la partie minimum légale dépendant de la loi LPP est concernée.
  • Il n’est « pas possible » de déduire des impôts un montant versé volontairement dans la caisse (rachat) jusqu’à trois années après la date de versement. Pour être concret, si vous retirez votre argent dans les trois ans suivant un rachat, vous devrez rembourser l’impôt économisé lors de ce rachat.

Quelques mots sur le système social

  • Il fonctionne bien (entendez « est fait ») pour un salarié gagnant jusqu’à CHF 84’600.- par an. Avec un tel salaire, vous pouvez comptez sur environ 60% de votre revenu à la retraite entre l’AVS et le deuxième pilier.
  • Si vous gagnez plus et que votre caisse de pension se contente de la loi, le 3e pilier n’est pas une option pour vous… c’est une « obligation ».
  • Tandis que si vous gagnez plus de CHF 140’000.-, courez mettre en place un plan d’épargne supplémentaire pour maintenir un niveau de vie décent et joyeux à la retraite.
  • A retenir que les rendements bas, persistants depuis des années, servis sur votre avoir de deuxième pilier, diminuent encore le capital attendu à la retraite (1% actuellement. En 2002, il était de 4%…).

Racheter sa caisse de pension, quésaco ?

Le rachat consiste à verser une partie de votre épargne dans votre 2e pilier.

Le montant de rachat possible est déterminé par votre niveau de salaire actuel.

Pour faire simple, la caisse calcule le montant d’épargne qui devrait se trouver aujourd’hui dans la caisse si vous aviez gagné votre salaire actuel depuis vos 25 ans.

Pour maximiser votre gain, il faut que l’argent que vous versez dans votre caisse y passe le moins de temps possible. Ainsi vous maximisez le rendement.

Attention : l’État – toujours soucieux de ne pas se « faire avoir » – a fixé à un minimum de trois ans la période pendant laquelle vous devez renoncer au capital racheté. Le fisc estime qu’une période inférieure s’assimile à de l’évasion fiscale (à ne pas confondre avec la fraude fiscale, pénalement répréhensible).

Pour illustrer mon propos, voyons trois exemples concrets :

Premier exemple : la retraite dans 30 ans.

Vous avez 35 ans et votre caisse offre un potentiel de rachat de CHF 270’000.-. Votre retraite est dans 30 ans, soit à 65 ans, et vous décidez en conséquence de racheter votre caisse de pension pendant les 27 prochaines années (stop à 62 ans, sinon votre capital est bloqué et vous serez obligé de prendre la rente) à raison de 10’000.- par an.

Vous générez 3’000.- d’économie fiscale par année et constituez 295’000.- de capital net à la sortie à vos 65 ans. En ce cas, votre rendement annuel net se monte à 3%.

Deuxième exemple : achat immobilier dans 10 ans.

Rachat en vue de rembourser votre dette immobilière dans 10 ansvous trouvez ici un article concernant le remboursement de la dette hypothécaire – ou en vue d’acheter votre résidence principale dans 10 ans.

Imaginons que vous souhaitez épargner CHF 150’000.- net d’impôt d’ici 10 ans pour l’une ou l’autre raison mentionnée ci-dessus.

Lorsque vous retirerez votre capital, vous paierez un impôt de sortie de environ 7%. Tout compte fait, le besoin de 150’000.- correspond approximativement à 161’000.- brut.

En considérant que vous n’effectuerez pas de rachat les trois dernières années il vous faudra verser dans votre caisse de pension la somme de 21’702.- par an entre l’année 1 et l’année 7.

Ce montant d’épargne vous fera économiser 6’500.- d’impôts chaque année pendant sept ans. Vous obtenez ainsi une économie d’impôt totale de 34’500.- (6’500 fois 7 ans moins 11’000.- en impôt de sortie) et vous réalisez un rendement annuel net raisonnable de 5%.

Troisième exemple : la retraite dans 5 ans.

Vous êtes à 5 ans de la retraite. Votre lacune de capital (montant du rachat disponible) est de CHF 270’000.-.

Votre revenu n’a jamais été aussi élevé et… vos impôts aussi !

Vous décidez de racheter votre caisse de pension sur les deux prochaines années à raison de 135’000.- par an puis de retirer le capital à 65 ans.

Ainsi, vous constituez 260’000.- d’épargne nette d’impôts à vos 65 ans, qui vous auront coûté environ 189’000.-. Votre rendement annuel net grimpe à 23% !

Ces trois exemples illustrent clairement que moins le temps s’est écoulé entre les rachats et le retrait, plus le rendement de l’épargne est haut.

Pour l’exemple 3, il est plus intéressant d’épargner, tout au long de sa vie, le capital de manière libre – en fonds de placement par exemple – puis de racheter sa caisse vers 60 ans.

Votre caisse de pension est à même de vous communiquer le montant de rachat disponible. Pensez à lui demander si votre rachat sera crédité dans la part obligatoire (LPP) ou sur-obligatoire (hors LPP).

En conclusion :

 Avant 50-55 ans, et sauf cas particulier, racheter sa caisse de pension est il me semble peu pertinent.

Une alternative m’apparaissant comme une meilleure solution serait de constituer un patrimoine via un plan d’épargne solide. Cela vous permettrait de toucher des rendements , tout en gardant une liberté maximale et de l’argent disponible pour d’autres projets si le besoin venait à se présenter.

Partagez l’article avec vos collègues si vous l’avez trouvé utile 😉

Raphaël

Informations sur les données utilisées : taux marginal d’impôts 30% ; taux de rendement caisse de pension 1% ; méthode de détermination du rendement TRI.

Prix de l’immobilier : un château en France pour le prix d’un appartement à Lausanne ?

Découvrez les risques que les prix de l’immobilier vous font courir et comment vous pouvez vous en protéger efficacement !

En Suisse, les prix de l’immobilier sont élevés. Pour 1.3 million de francs, vous pouvez acheter un appartement de 130 mètres carrés au cœur de Lausanne ou de 90 mètres carrés à Genève, soit entre 4 et 5 pièces.

Vous pouvez aussi acheter un château et ses dépendances de 1’400 mètres carrés sur un hectare de terrain à moins d’une heure de route de Genève. 50 pièces (si j’ai bien compté) plus les caves.

Cerise sur le gâteau : vous ne seriez pas trop dépaysé puisque le château est en Savoie et que jusqu’en 1536, le canton de Vaud était sous l’administration de la maison de Savoie…

Si vous voulez rêver en image, rendez-vous directement à la fin de cet article pour les liens et si vous avez 5 minutes devant vous, vous êtes libre de lire les lignes ci-dessous.

Les prix de l’immobilier sont-ils devenus fous ?

Ces dernières semaines, l’Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers (FINMA) et le Fonds Monétaire International ont émis des inquiétudes quant aux prix de l’immobilier suisse.

Pour une énième fois en près de dix ans, des instituts nationaux et internationaux soulignent les risques liés au marché immobilier dans notre pays.

La Banque nationale suisse et le Département fédéral des finances nourrissent depuis plusieurs années les mêmes inquiétudes.

Afin de limiter les prix, la FINMA introduit de nouvelles mesures

Les craintes passées étaient majoritairement dues aux taux d’intérêts bas entraînant les prix dans une hausse continue. En 2014, les autorités financières ont introduit des mesures restrictives quant à l’accès au logement (10% de fonds propres en liquide avant de toucher à sa caisse de pension).

Au niveau national, cette mesure a permis de limiter partiellement la hausse des prix. Par contre, dans le détail – notamment sur les cantons de Vaud, Genève et Zürich – la demande forte a poussé les prix à la hausse, allant jusqu’à doubler les valeurs entre 2007 et aujourd’hui.

Les prix continuent de grimper. La vacance locative aussi…

Actuellement (mi 2019), la principale source de stress est le taux de vacance qui augmente partout en suisse. Ce taux représente le nombre de logements restant vides et ne trouvant pas de locataires. Il est de 0.5% à Genève, 1% sur Vaud et supérieur à 2% dans dix cantons, parmi lesquels le Valais, Neuchâtel et le Jura. Ce taux croît à un rythme de 8% en moyenne chaque année depuis 5 ans.

Cet excès d’offre s’explique également par les taux d’emprunt bas. Les exploitants et les investisseurs sont prêts à baisser leurs rentabilités puisque le coût de la dette est peu élevé et leur permet de dégager un profit – même s’il est faible – supérieur à celui qu’ils peuvent obtenir en obligations de la Confédération ou des Cantons (taux nuls ou négatifs).

…et les rendements baissent.

Pour les immeubles de rendement, les prix ont tellement progressé que le rendement annuel a baissé de 2% en dix ans, passant de 5% à 3%. Si l’immeuble vous coûte chaque année 1% de sa valeur en entretien et 1.5% pour les intérêts hypothécaires, votre marge est quasi nulle et vous êtes exposé à une hausse des taux de seulement 0.5%.

Les grands gagnants des taux bas et de l’excès d’offre sont les promoteurs immobiliers, les entreprises générales, les agences immobilières… et en théorie les locataires, qui peuvent faire jouer la concurrence. Pensez que Sion et Sierre affichent respectivement 8% et 10% de vacance !

En quoi ces alertes doivent-elles nous interpeller ?

En ne voyant finalement rien venir, l’habitude d’entendre parler de « risque, bulle, surchauffe » chaque année depuis dix ans aurait tendance à nous endormir.

Pour construire votre patrimoine, vous ne devez pas vous contenter de la première victoire : « j’ai emprunté à taux très bas ». Il faut penser à long terme. Cette victoire d’un emprunt peu cher doit vous permettre d’épargner plus afin de rembourser plus tard votre dette en cas de baisse des prix.

L’histoire nous apprend que l’économie est très inerte et que, généralement, seul un choc (positif ou négatif) peut l’infléchir. Le dernier choc en date – la hausse des taux d’emprunt – est venu de la Réserve fédérale des Etats-Unis en décembre 2018. L’établissement prévoyait même d’autres hausses en 2019, mais au vu des réactions politiques et du marché, il a revu sa copie quelques semaines plus tard.

Cinq raisons pour lesquelles vous êtes à risque :

Bien que les derniers rapports portent sur les biens de rendement, on ne peut exclure des risques pour votre appartement ou votre maison (si vous êtes propriétaire) et même pour votre caisse de pension ou votre épargne bancaire.

  1. Votre résidence principale est financée par les mêmes établissements bancaires ou d’assurances via des hypothèques. Si les taux venaient à monter, elle serait soumise à des fluctuations de prix (valeur du bien) ou de coûts (intérêts hypothécaires). Il existe en effet une corrélation très forte entre le coût de l’hypothèque et le prix de l’immobilier (voir les années 1990). Ici, vous pourriez être amené à rembourser une partie du prêt pour rester dans l’endettement normal des 80% et/ou à dépenser plus chaque mois en intérêts.
  2. Pas de hausse de taux ne signifie pas forcément une absence de baisse de prix. L’exemple du Japon sur les 20-30 dernières années en est le parfait exemple : des taux bas et des prix en baisse continue de 2% par an dans certaines régions (-2% par an pendant 10 ans = -20%). Un remboursement de la dette finirait par avoir lieu, mais plus tard.
  3. Un bien en propriété individuelle fait partie du marché global des prix et des loyers. A l’échelle d’un immeuble de 10 appartements, la moyenne Suisse est de 4 logements en propriété individuelle pour 6 logements de rendement. Penser que le marché des biens de rendement ne peut influer les prix des biens individuels est, il me semble, une erreur d’appréciation.
  4. Votre caisse de pension est probablement gourmande d’immobilier de rendement depuis que les taux obligataires sont négatifs. Si les taux venaient à monter, la rentabilité des immeubles deviendrait négative et les prix baisseraient probablement, obligeant une recapitalisation « forcée » afin de rembourser les dettes. A votre avis, qui paye dans ce cas ? Un durcissement voire une interdiction de retrait de ce capital pourrait aussi avoir lieu.
  5. 85% (!) des avoirs locaux détenus par les banques suisses proviennent des prêts hypothécaires.

Quelles mesures pouvez-vous prendre pour vous protéger d’une baisse des prix de l’immobilier et gagner en indépendance financière !

Retenez que votre argent déposé sur vos comptes courants et épargnes sert principalement à financer les hypothèques des autres clients de la banque.

En cas de baisse des prix de l’immobilier et comme pour les caisses de pension, nous pouvons imaginer que vous (propriétaires) soyez amené à rembourser vos dettes. Dans le cas où trop de clients ne peuvent rembourser leurs dettes, la banque pourrait combler sa faillite en se servant dans votre épargne (vos comptes) dont elle est – pour rappel – le propriétaire juridique.

  • Diversifiez votre patrimoine (immobilier, actions, métaux précieux, liquidités, revenu alternatif, 3e pilier, 2e pilier).
  • Épargner. Remboursez indirectement votre dette : au plus tard à 65 ans, vous devriez être en mesure de rembourser l’intégralité de votre dette (dans la réalité, vous ne le ferez pas forcément pour des raisons fiscales et de rentabilité du patrimoine, mais si les taux d’emprunt hypothécaire venaient à flamber, vous en auriez les moyens). Vous pouvez lire ici un article sur l’intérêt de rembourser sa dette hypothécaire.
  • Planifiez correctement votre durée d’emprunt. Profitez des taux bas et mettez toujours en opposition vos actifs (actions, immobilier etc.) et vos passifs (emprunts) aujourd’hui et dans le futur (projection).
  • Limitez votre épargne en comptes (courant et épargne) à 100’000.- francs par établissement bancaire. Cette loi, même si je la trouve bancale, a le mérite d’exister et empêcherait d’être dans les premiers clients ponctionnés.

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Raphaël

Vous trouvez ci-dessous les liens du château et des références pour Lausanne et Genève :

Le château dont je fais allusion, dans la plus belle agence immobilière de France @patrice-besse : https://www.patrice-besse.com/chateaux-a-vendre/rhones-alpes/proche-geneve-propriete-lac/

Des appartements à Lausanne : https://www.immostreet.ch/fr/acheter/appartement-et-maison/a-lausanne/prix-1150000.0-1300000.0/?pageNum=1&sort=pd

Des appartements à Genève : https://www.immostreet.ch/fr/acheter/appartement-et-maison/a-geneve/prix-1150000.0-1300000.0/?sort=pd

Les sources utilisées : Statistiques Etat de Vaud, Arcinfo, FINMA, BNS, RTS, DFF, immostreet, patrice-besse.com

Immobilier : faut-il rembourser votre dette hypothécaire ?

Avez-vous un intérêt à rembourser votre dette hypothécaire d’ici à la retraite et quels risques courez-vous à ne pas le faire ? Si vous aimez l’article, partagez-le !

En Suisse, nous sommes habitués à ne rembourser que partiellement nos dettes immobilières, et vous, remboursez-vous votre dette hypothécaire ? Que se passerait-il si nous assistions à une hausse des taux d’intérêts ou à une baisse des prix de l’immobilier ? La question est moins de savoir si l’un de ces événements se produira que de décider si vous êtes capable d’affronter une telle situation.

Les études montrent que plus de 80% des prévisions économiques s’avèrent a posteriori erronées. Dès lors, il ne s’agit pas à mon sens d’anticiper (intellectuellement) si les taux vont monter ou si les prix vont baisser, mais de savoir comment se protéger de tels événements.

Éteindre sa dette hypothécaire pour se protéger du prêteur

Avant tout, vouloir éteindre sa dette est une bonne chose, permettant de dormir tranquille et de transmettre plus que la partie d’une maison à ses enfants.

Si vous éteignez votre dette, de facto vous réalisez deux choses : 1. vous augmentez votre patrimoine et 2. vous vous protégez de la hausse des taux ou d’une baisse des prix de l’immobilier. En bref, vous gagnez en liberté financière. Et quelque part, vous gagnez aussi du temps de vie, que ce soit en années de retraite anticipée (plus de loyer à payer), en années sabbatiques ou en temps de travail partiel ou « à la carte ».

Prix et taux : l’effet ciseau

Historiquement, les prix de l’immobilier sont inversement corrélés aux taux d’emprunts. En effet, quand les taux sont hauts, les prix sont bas (cf. la crise de 1990) et lorsque les taux sont bas, les prix sont hauts (cf. la situation actuelle). Il existe donc un effet de « ciseau » entre les taux et les prix.

Depuis près de vingt ans, je construis mon patrimoine avec conservatisme et pragmatisme. Je conseille mes clients sur le même modèle. Mes sources sont principalement l’histoire et certainement pas les prévisions globales (macroéconomie) qui – exception faite des discussions de café – ne sont pas utiles. Elles ne sont pas non plus autoréalisatrices : y croire ou se persuader d’y croire avec les autres (via les médias) ne les fera pas pour autant arriver.

Cela ne m’interdit pas d’avoir un avis. Mais pourquoi mes prévisions seraient-elles plus probables que celles des « grands » économistes et analystes ?

À ce propos, je vous livre mon sentiment. En Suisse, les taux resteront probablement bas encore quelques années. Cela dit, le monde est majoritairement endetté en dollars américains et l’économie fonctionne très bien aux États-Unis. Il n’y a pas d’avantage, lorsqu’une économie fonctionne correctement, à garder des taux bas afin de ne pas entraîner d’inflation. Aujourd’hui, ces problèmes ne sont pas d’actualité mais si nous regardons la dernière crise immobilière des années 1990, nous constatons qu’elle est venue des États-Unis.

A l’époque, la FED a multiplié ses taux par 4 (!) en l’espace de deux ans. Il en a résulté une raréfaction de l’argent qui s’est traduite en Suisse par une hausse des taux d’intérêts hypothécaires atteignant 8%  à court terme et des baisses de prix immobiliers compris entre -20% et -40%. Les propriétaires de l’époque s’en souviennent encore.

Ici s’était déroulé l’effet ciseau mentionné plus haut.

L’exception ? Le Japon.

Cependant, être focalisé sur les taux ne vous donnera pas nécessairement la bonne réponse. Voyez le cas du Japon : au pays du soleil levant, vous pouvez emprunter à des taux inférieurs à 1% sur 30 ans. Depuis une trentaine d’années, les taux sont bas. Malgré cette baisse, il n’existe pas d’effet ciseau. Effectivement, dans certains quartiers de Tokyo, les prix de l’immobilier ont reculé de 30% à 50% sur la même période. Ceci contredit totalement le paradigme historique existant jusqu’à maintenant chez nous. Si nous entrions en stagnation persistante (ou en déflation), nous pourrions obtenir le même type de résultat.

Un cas pratique

Il est peut être utile de rappeler à travers un exemple concret ce qu’il se passe si les taux grimpent ou que les prix baissent vis à vis du prêteur (i.e. la banque ou l’assurance). Laissons l’exemple englober les deux événements en même temps :

Une famille suisse a deux enfants en bas âge, disons d’environ 5 ans. Après quelques recherches, les parents jettent leur dévolu sur une jolie maison de 1.2 million de francs. Pour ce faire, ils dépensent 20% de fonds propres plus les taxes. Le prêteur leur prête 80% du prix d’achat soit 960’000 francs à 1.5 % sur 12 ans. Une fois dans leurs murs, les Suisses payeront 1’200.- par mois pour les intérêts hypothécaires. Si l’on ajoute les charges du bien (charges quotidiennes et entretien à long terme) et la hausse d’impôt (due à la valeur locative), la maison leur revient à environ 2’500.- par mois.

A ce prix là et comparativement à un bien immobilier en location, cela peut valoir la peine. Sauf que le temps file et que rien n’est figé : le prêt a une échéance, l’économie change, l’humanité change, les technologies changent, la démographie change… bref, nous vieillissons. 🙂

Douze années ont passé. Les enfants de cette famille suisse ont 17 ans. Dans un an ou deux, ils vont probablement faire leur entrée dans une école supérieure ou à l’université. Comprenez : ils vont encore coûter plus cher. La prime d’assurance santé augmentera à leurs 18 ans, de même que les frais de logement, auxquels s’ajoutent un abonnement de téléphone, des frais d’écolage, etc.

Aussi les taux ont changé et les prix ont baissé (c’est le pire scénario – il a déjà existé par le passé). Supposons à présent que le prix de la maison a baissé de 15% et que les taux à court terme sont passés à 4.5% (moyenne historique).

Quelle incidence à la retraite et sur le budget ?

Que se passe-t-il vis à vis de l’établissement prêteur ? Ce dernier est toujours d’accord de prêter à la famille Suisse 80% de la valeur de la maison, car ils sont loin de la retraite, mais selon de nouvelles conditions ! La maison achetée 1.2 million de francs vaut désormais 1 million. Le créancier prêtera donc 800’000 francs et demandera de rembourser les 160’000.- de différence.

Sans avoir planifié correctement le remboursement de leur dette hypothécaire, la famille Suisse est bonne pour retirer son deuxième pilier… en pure perte (entraînant de facto une baisse de la retraite future de 1’000 francs par mois !).

Retirer son 2e pilier à 35-40 ans n’a que peu d’incidence si c’est calculé correctement. Par contre, vers 50 ans et sans planification, ce n’est pas la même histoire. Je vous invite à lire l’article sur le niveau de dette hypothécaire à la retraite ici.

Ensuite, ces 800’000 francs seront facturés à la famille Suisse à 4.5%, soit 3’600.- par mois. En ajoutant à cela les frais d’entretien de la maison, notre famille modèle payera un loyer mensuel de 4’800.- au moment même où les enfants n’auront jamais coûté aussi cher !

Pour ceux qui n’envisagent pas que les prêteurs pourraient demander des remboursements, regardez ce qui s’est passé en Suisse dans les années 1990 et plus récemment aux USA, en Espagne, au Portugal ou encore en Grèce… en 2008. 

À noter que la durée de votre hypothèque vous « protège » sur le taux mais aucunement sur la valeur du bien. Le créancier peut effectivement vous demander un remboursement exceptionnel et anticipé avant l’échéance. Le prêteur peut également revoir une situation personnelle (suite à un décès, un changement de revenu etc.)

Pour conclure :

Rembourser sa dette hypothécaire au plus tard d’ici à la retraite relève simplement du bon sens. Nos voisins européens le font. Le système libéral suisse de l’hypothèque – que je trouve excellent – laisse paraître l’illusion qu’il n’est pas utile de rembourser sa dette. C’est ridicule.

Si vous voulez vivre et non survivre à la retraite, vous devez rembourser votre dette immobilière et vous protéger de la dette hypothécaire. Ceci est également vrai pour les locataires : les fruits de votre patrimoine devraient idéalement payer votre loyer à la retraite.

Pourquoi écrire que je trouve le système excellent ? Parce que vous pouvez amortir indirectement votre dette, c’est à dire épargner à rendement plus élevé que le taux d’emprunt. Tout est là ! Amortir indirectement en profitant de rabais fiscaux et de rendements intéressants. C’est un autre sujet… que vous trouvez ici.

Alors faut-il rembourser sa dette hypothécaire ? N’hésitez pas à me donner votre avis en commentaires !

Raphaël