Retraite suisse – Deuxième pilier : baisser mes impôts et acheter ma résidence principale – Épisode 5

Apprenez comment utiliser votre deuxième pilier pour baisser vos impôts et pour acheter votre résidence principale.

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acheter ma résidence principale et baisser mes impots grace au deuxieme pilier et a ma caisse de pension

Lors du dernier article sur la retraite suisse, nous avons vu que choisir un poste de travail moins rémunérateur mais avec une meilleure caisse de pension peut être le bon choix. Voyons aujourd’hui comment vous pouvez utiliser votre deuxième pilier pour baisser vos impôts 🙂 grâce aux rachats et pour financer votre résidence principale.

L’article peut vous paraître long… j’espère ici vous apporter un maximum de valeur. Vous serez alors incollable sur l’utilisation du deuxième pilier. 😉 Bonne lecture !

Je rachète ma caisse de pension et je baisse mes impôts

Un montant de « rachat » correspond à la différence entre le capital que vous avez accumulé aujourd’hui et ce qu’il y aurait dans votre caisse si vous aviez toujours eu les conditions d’épargne et de salaire que vous avez actuellement, et ce depuis vos 25 ans. C’est à cet âge que l’on commence à épargner dans le deuxième pilier.

Pour étayer mes propos, imaginez que vous avez 40 ans et que vous rejoignez une nouvelle entreprise avec un salaire de CHF 150’000.- annuel. Votre capital de deuxième pilier transféré depuis votre ancienne caisse se monte à 86’000.-. Votre ancien employeur vous permettait de cotiser au minimum légal alors que votre nouvel employeur fait tout le contraire : pas de plancher et de plafond sur le salaire assuré et des bonifications de vieillesse largement supérieure à la loi.

Vous découvrez sur votre relevé de caisse de pension que le montant de rachat possible est de 243’500.-. Cela signifie que si vous aviez travaillé à salaire égal et à caisse de pension égale dans cette entreprise depuis vos 25 ans, vous auriez dans votre caisse 329’500.- (la somme de votre apport de 86’000.- et du rachat possible de 243’500.-).

Vous pouvez donc ajouter (racheter) ce montant de votre poche dans votre caisse puis le déduire entièrement de votre revenu imposable.

Certaines caisses (généralement dans les grandes entreprises) permettent également de financer une retraite anticipée allant jusqu’à 5 ans avant l’âge légal (donc 59 ans pour les femmes et 60 ans pour les hommes). Le but ici est de maintenir le niveau de la rente entre ces 5 ans anticipés et la retraite « normale ». Pour avoir droit à ce rachat, il faut avoir complété les lacunes du rachat correspondant à l’âge légal. Ensuite, vous aurez le droit de financer / racheter les années de retraite anticipée et de déduire les montants de votre revenu imposable.

Quelle économie d’impôt pour un rachat ?

Alors vous allez sans doute me demander combien d’impôts vous pouvez économiser ? Et je n’ai pas de réponse toute faite car cela dépend de votre situation fiscale.

Cette dernière est influencée par plusieurs facteurs et notamment votre canton et votre commune de résidence, l’ensemble de vos revenus (revenus du travail et du patrimoine) et encore de votre situation familiale (marié, célibataire, nombre d’enfants).

Les notions à comprendre lorsque l’on parle d’économie d’impôt et que vous devriez connaître – si vous souhaitez réduire vos impôts – sont le taux moyen et le taux marginal d’imposition. En Suisse, l’impôt est progressif et fonction du revenu.

Un exemple d’économie d’impôts

Imaginons que notre quadra, cité plus haut, forme un couple marié et vit à Lausanne, avec deux enfants. Le couple gagne 180’000.- brut annuel et paye 25’811.- d’impôt à l’année. Ces 25’811.- représentent le taux moyen d’impôt de 14.4% des revenus (25’811/180’000).

Imaginons maintenant que notre couple augmente ses revenus de 1’000.- par an. Leurs impôts augmenteront à 26’057.-. Cette hausse de 245.- appliquée sur les 1’000.- de revenu nouveau revient à 24.5%. Ce taux est le taux marginal d’imposition. Il fonctionne dans les deux sens : si notre couple réduit son revenu de 1’000.- en rachetant sa caisse de pension, il économisera 245.- d’impôts ou 24.5% du montant racheté.

Retenez que plus le montant racheté sera petit et plus votre économie d’impôt sera proche de votre taux marginal. A l’inverse plus le montant sera élevé et proche de votre revenu annuel et plus vous économiserez votre taux moyen.

(Vous souhaitez connaître votre taux marginal ? Rencontrons-nous : raphael.battu@maretraite.ch).

L’erreur à ne pas commettre !

Une erreur à faire serait de racheter sur une seule année sa caisse de pension. Si je reprends l’exemple de notre salarié de 40 ans qui peut racheter 243’500.-, en le faisant sur une seule année, il économisera 25’811.-. Cela n’est pas judicieux car il économisera « seulement » ce montant de 25’811.- correspondant à 10.6% du rachat (25’811/243’500).

Il vaudrait mieux pour lui étaler son rachat sur 20 ans en épargnant 12’175.- chaque année et ainsi économiser 2’654.- d’impôts par an. Cette économie correspond à 21.8% de rabais fiscal et forme après 20 ans 53’080.- soit deux fois plus !

Ceci est d’autant plus vrai que son taux d’impôt devrait grimper au fur et à mesure que son revenu augmente dans le temps.

Avant de procéder à un rachat, souvenez-vous qu’une fois que l’argent est « mis » dans votre caisse de pension, son retrait sera restreint aux cas suivants : la retraite légale (homme 65 ans, femmes 64 ans) ou cinq ans avant, l’achat de votre résidence principale, le remboursement de votre dette hypothécaire, des travaux dans la maison, un départ définitif à l’étranger ou encore pour vous mettre à votre compte comme indépendant.

Si vous souhaitez plus d’informations et une explication illustrée par trois cas pratiques, je vous renvoie ici à mon article sur le rachat de la caisse de pension.

Le capital de 2e pilier peut donc être utilisé pour financer sa résidence principale. Voyons cela.

Utiliser sa caisse de pension pour acheter sa résidence principale… et plus

Acheter la maison de ses rêves est le souhait de nombreuses personnes en Suisse. Toutefois, les prix sont très élevés et le niveau de fonds propres exigé peut vite se révéler un handicap.

Les établissements financiers demandent un apport minimum en fonds propres de 20% du prix d’acquisition auquel il faudra ajouter les taxes diverses – les fameux frais de notaire – pour environ 5% du prix d’acquisition.

Le deuxième pilier représentant une part importante du patrimoine pour beaucoup de Suisses, les fonds propres des nouveaux acquéreurs ont été financés pendant de nombreuses années par un retrait total ou partiel de leurs caisses de pension. Seuls les 5% de taxes étaient financés avec des liquidités.

La règle des 10%

Dans un environnement de prix haussier et de taux d’emprunt bas, l’Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers (FINMA) a introduit à l’été 2012 une règle fixant à 10% la part de fonds propres NE POUVANT VENIR de la caisse de pension – que ce soit un nantissement ou une sortie de fonds.

Pour faire simple, vous devez financer en liquide ou/et en 3e pilier au moins 10% de votre achat. Le reste de vos fonds propres peuvent venir de votre caisse de pension.

Cette règle a été introduite pour limiter la faillite des acquéreurs en cas de variation des deux facteurs principaux régissant le marché immobilier : 1. les prix de l’immobilier fluctuent dans le temps et une baisse de ces derniers pourrait entraîner une perte des fonds propres (et donc des avoirs de retraite) mettant en danger financier les propriétaires tant à la retraite qu’au moment de la baisse du marché (les prêteurs pouvant exiger un remboursement pour combler la différence de prix) et 2. grâce aux taux d’emprunt bas, une part plus importante de la population a pu devenir propriétaire. Si les taux remontaient, une partie d’entre eux pourrait se trouver en difficulté pour traiter leur dette.

Attention, il ne faut pas mal interpréter la règle : je vois trop souvent des acheteurs qui pensent ne pas pouvoir utiliser plus de 10% de leur deuxième pilier ou qui croient devoir limiter leur retrait à 10% du prix d’acquisition. Si vous souhaitez par exemple investir 50% de fonds propres, vous pouvez tout à fait mettre 10% en provenance de vos liquidités et 40% en provenance de votre caisse de pension. Vous pouvez aussi vider totalement votre caisse de pension.

Ce dernier choix ne serait généralement pas judicieux à 45 ans, mais à l’âge de 30 ans, son impact sur la retraite future reste limité.

Et les jeunes dans tout ça ?

Les jeunes générations pourraient légitimement critiquer cette règle dont l’absence pendant de nombreuses années a permis aux générations précédentes de devenir propriétaire sans épargner « plus » que le minimum légal via la caisse de pension. Ajouté à l’explosion des prix dans l’ancien sur les deux dernières décennies, il devient clairement très compliqué de devenir propriétaire pour les jeunes générations, sauf à hériter d’un bien familial.

Rembourser la dette de sa résidence principale et y faire des travaux grâce au deuxième pilier

Notez que vous pouvez également utiliser votre deuxième pilier pour rembourser totalement ou partiellement la dette de votre résidence principale. Il faut bien évidemment rester dans le cadre des 10% de fonds propres en liquide et/ou en 3e pilier.

Une seconde règle édictée en 2014, toujours par la FINMA, impose de diminuer la dette aux 2/3 du prix d’acquisition 15 ans après l’achat et au plus tard à la retraite.

Vous pouvez aussi financer des travaux avec votre caisse de pension. Seuls des travaux à plus-value seront acceptés par votre caisse. Un conseil ici – à condition que vous ayez suffisamment de temps d’ici à la retraite et que votre dette reste raisonnable au regard de votre situation globale – pourrait être de combiner un emprunt bancaire (en augmentant votre dette globale) à un retrait ou à un nantissement de votre caisse de pension.

Une plus-value est l’ajout d’un élément par rapport à l’existant. Par exemple : vous avez du simple vitrage et vous souhaitez financer du double ou triple vitrage. Le montant équivalent au remplacement du simple vitrage devra être pris en charge par des liquidités (éventuellement la banque, si elle est d’accord) puis le surcoût lié à la pose du double ou triple vitrage pourrait venir de votre deuxième pilier. A savoir que la règle sur la plus-value vaut aussi pour le troisième pilier.

Une mise en garde

Si vous prévoyez de grands travaux afin d’avoir une maison « comme neuve » et sans souci en vue de votre retraite, planifiez cette dernière correctement et suffisamment tôt avant de ponctionner votre caisse de pension. En effet, moins vous aurez de capital à la retraite dans votre deuxième pilier, moins vous aurez de rente et votre faisabilité bancaire pourrait en pâtir drastiquement. Ainsi et afin de maintenir votre dette à la retraite, vous pourriez être obligé de rembourser plus de dette que ce que vous aviez imaginé. En l’absence de réserves de liquidités suffisantes, vous pourriez dire au revoir à votre résidence principale.

Il peut être utile de se faire conseiller !

Un cas pratique pour combiner rabais d’impôts et achat de sa résidence principale

Prenons le cas de notre famille cité plus haut. Ils ont 40 ans, deux enfants et vivent à Lausanne. Mettons qu’ils souhaitent acheter leur résidence principale d’ici à dix ans.

Ils imaginent financer leur maison par un mix regroupant des liquidités, du 3e pilier et du 2e pilier.

Notre salarié dispose d’un rachat maximum possible de 243’500.- au sein de sa caisse de pension et il souhaite s’en servir en partie afin de construire ses fonds propres et pour réaliser un gain fiscal sur les prochaines années.

Notre famille est prête à épargner 20’000.- par année. Ce montant leur procurera environ 5’460.- d’économie d’impôt annuelle, augmentant d’autant leur capacité d’épargne !

Ils se limiteront à un rachat annuel pendant les sept prochaines années. En effet, une règle fiscale ne permet pas de racheter les trois dernières années précédant un retrait. Cela est assimilé par le fisc à une évasion fiscale.

Au bout des 10 ans, ils auront accumulé 167’459.- de capital (intérêts moyen de 3% annuel compris) dans le deuxième pilier et auront économisé 38’220.- d’impôts.

Ils payeront un impôt de sortie sur le capital d’environ 12’900.- leur laissant un montant net de 154’559.-.

Vous pouvez suivre le même type de schéma avec la planification de vos travaux ou le remboursement de votre dette hypothécaire. En bonus, vous pourrez déduire fiscalement le montant des travaux d’entretien de votre revenu. Les plus-values sont quant à elles déduites de votre gain immobilier lors de la vente de l’immeuble.

En conclusion

Bien que le but principal du deuxième pilier soit de financer la retraite, vous pouvez, selon vos objectifs et la phase de vie que vous traversez, vous en servir aussi bien pour économiser des impôts que pour construire votre patrimoine immobilier ou financier. In fine, vous récupérerez votre capital ou votre rente au plus tard à la retraite.

Il serait dommage d’oublier votre deuxième pilier, comme beaucoup de gens, et de ne pas s’en servir avant vos 64/65 ans !

La semaine prochaine, nous verrons que le baby boom et les taux négatifs pèsent sur le deuxième pilier. Nous aborderons les probables limites que subira la prévoyance professionnelle à l’avenir. Cela nous permettra de discuter du troisième pilier.

Si l’un de vos collègues, amis ou membre de votre famille vous bassine avec l’achat de sa résidence principale ou vous questionne sans cesse sur comment économiser des impôts grâce au rachat du deuxième pilier, partagez lui cet article ! Vous gagnerez du temps et lui rendrez un chouette service 😉

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