Prendre une retraite anticipée grâce à son deuxième pilier.

Découvrez l’impact d’une retraite anticipée sur votre deuxième pilier.

Nous avons vu ici quelle incidence peut avoir une retraite anticipée de deux ans sur la rente AVS. Je vous propose aujourd’hui de discuter de l’impact d’une retraite anticipée de deux ans sur le deuxième pilier.

Petit rappel sur le deuxième pilier.

Le deuxième pilier est une épargne « forcée » que vous constituez tout au long de votre carrière, via la caisse de pension de votre employeur. Cette épargne fait partie de votre fortune et vous sera versée à la retraite sous forme de rente ou de capital.

La Loi sur la Prévoyance Professionnelle (LPP) fixe un minimum de cotisation par tranche d’âge.

Selon le bon vouloir de la société qui vous emploie, vous pourriez cotiser le « minimum légal » ou un montant supérieur.

Notez que le deuxième pilier fait face à des défis structurels : l’allongement de la durée de vie, les taux bas et négatifs ou encore le nombre croissant de retraités. La LPP est et va continuer d’être sous pression à moyen long terme. Vous trouvez un article sur le sujet ici.

**Astuce : bien choisir son employeur.**

De nombreuses personnes croient que ce qui rend une caisse bonne est le niveau de répartition de l’épargne annuelle entre l’employeur et l’employé. La LPP stipule que les deux parties doivent cotiser à parts égales (moitié-moitié) dans la caisse de pension. Pour beaucoup de travailleurs, c’est le cas, mais certaines entreprises versent par exemple deux tiers des cotisations et le salarié épargne le tiers restant. Ce n’est pas forcément cette méthode qui vous est profitable.

Une caisse de pension peut présenter un intérêt lorsque l’employeur offre un plan supérieur au minimum légal.

Voyons un exemple simple : si vous gagnez 100’000.- francs par an, votre employeur a l’obligation de calculer votre épargne retraite sur 60’435.- de revenu uniquement (chiffre 2020). Un plan plus généreux que le minimum légal peut être de cotiser sur la base des 100’000.- de revenu. Et ce, même si vous devez en payer la moitié. 🙂

Vous trouvez plus d’informations sur « comment bien choisir son employeur » ici.

Le taux de conversion du deuxième pilier.

La retraite ordinaire est fixée à 65 ans pour les hommes et à 64 ans pour les femmes. Vous trouvez le montant de votre rente et de votre capital espérés à cet âge sur votre certificat de prévoyance annuel. Vous y trouverez également le montant de votre capital accumulé à ce jour.

Vous trouvez ici un exemple pour vous aider à décortiquer votre certificat.

Le niveau de votre rente de retraite est en général déterminé par le capital attendu à votre retraite. Pour déterminer le niveau de rente, on applique un pourcentage sur le capital. C’est le taux de conversion.

Votre capital (et la rente qui en découlera) est « découpé » en deux grandes parties. La première dépend du minimum légal selon la LPP et est soumise au taux de conversion de 6,8%, tandis que la seconde partie, dépassant le minimum légal et appelé surobligatoire, est traitée à un taux de conversion librement choisi par la caisse, par exemple 5,25%.

Marie et Luc ont la cinquantaine et souhaitent prendre leur retraite dans dix ans.

Reprenons notre « couple exemple » de l’article précédent : Luc et Marie.

En ce qui concerne leurs deuxièmes piliers, Luc disposera vraisemblablement d’un capital de 700’000.- à ses 65 ans et Marie de 250’000.- à ses 64 ans.

Les 700’000.- de Luc sont formés de 300’000.- selon le minimum LPP et de 400’000.- de capital surobligatoire. La part LPP lui servira une rente de 1’700.- mensuel (300’000.- converti à 6.8% soit 20’400.- annuel), tandis que le capital surobligatoire serai converti à 5,25% pour une rente de 1’750.- par mois (21’000.- par année).

Au total, Luc aura le droit à 3’450.- par mois de son deuxième pilier.

Marie quant à elle voit son capital de fonds de pension traité uniquement par la LPP et converti au taux légal de 6.8%. Sa rente s’élèvera donc à 1’416.- par mois (17’000.- par an).

Ensemble, Luc et Marie percevront 4’866.- mensuel en provenance du second pilier.

Le taux selon la LPP de 6,8% est en théorie figé par la loi. Toutefois et au vu des défis à venir, il est possible qu’il vienne à être revu, même pour les personnes déjà en retraite.

La retraite anticipée et le deuxième pilier

Nous avons vu qu’en prenant une retraite anticipée de deux ans, soit à 63 ans, Luc verra sa rente AVS diminuer de 13.6% par an et à vie.

Venons-en maintenant aux possibilités de retraite anticipée via le deuxième pilier.

La LPP ne prévoit pas de retraite anticipée. Toutefois, le règlement de votre caisse peut le prendre en compte et vous permettre de percevoir votre rente (ou votre capital) en avance.

Si votre caisse le permet, votre rente sera, tout comme l’AVS, plus basse que celle de la retraite ordinaire.

Notez que certaines caisses incluent la possibilité, grâce au rachat volontaire, de financer sa retraite anticipée avec un départ à 58 ans. L’idée est de transposer la rente due à 65 ans dès ses 58 ans. Ne vous méprenez pas, cela coûte cher.

Si vous souhaitiez absolument prendre deux ans de retraite anticipée comme Luc, mais que votre caisse de pension ne le prévoit pas dans son règlement, il vous faudrait démissionner et renoncer à la rente. Vous percevrez le capital.

Ce n’est pas forcément négatif si le reste de votre patrimoine vous permet de maintenir votre niveau de vie antérieur ou si vous souhaitez partir vivre à l’étranger, dans un pays où la vie est moins chère par exemple. Tout cela se calcule.

Luc anticipe sa retraite de deux années.

La caisse de pension de l’entreprise de Luc permet de prendre une retraite anticipée.

Le certificat de prévoyance de Luc l’informe que sa rente de retraite ordinaire est prévue de se monter à 3’450.- par mois et de diminuer à 2’980.- à l’âge de 63 ans, soit une baisse de 13,6% dans le même esprit que l’AVS. Cela représente un manque à gagner de 470.- par mois.

Ainsi, lors de sa retraite anticipée, Luc percevra de son deuxième pilier un taux de conversion moyen de 5,11% « à vie ».

**Astuce : rente ou capital ?**

La rente n’est pas la meilleure solution dans tous les cas. Cela dépend de votre état de santé, de votre train de vie, du niveau de votre fortune, si vous êtes propriétaire de votre résidence principale, de l’état de vos dettes immobilières, etc. Faites-vous assister par un conseiller financier pour planifier une retraite sereine. Vous trouvez un article sur ce thème ici.

Quelle perte de revenu à la retraite ?

En anticipant la retraite de deux ans, et si aucune modification des lois AVS et LPP ou des règlements de caisse de pension ne vient modifier ces chiffres, les rentes des premiers et deuxièmes piliers de Luc et Marie se monteront probablement à 7’806.- par mois.

Si l’on compare avec leur salaire actuel de 16’700.- brut mensuel, la pension de 7’806.- peut sembler maigre. Leur rente se montera à moins de 47% de leur revenu actuel ! C’est le cas pour la majorité des personnes dans notre pays, même en l’absence d’anticipation.

Nous verrons lors d’un prochain article comment notre couple pourrait optimiser sa situation en profitant des dix années qui les séparent de la retraite.

Vous avez aimé cet article ? Si vous avez des amis ou des parents qui partent à la retraite dans une dizaine d’années, partagez-leur cet article, vous pourriez les aider à y voir plus clair 😉

Quel est le prix à payer pour une retraite anticipée ?

J’ai cinquante-trois ans aujourd’hui. Dans douze ans, je serai à la retraite et je pourrai enfin profiter de mon temps libre ! Réaliser tous mes projets sans cesse remis aux calendes grecques, découvrir le monde et profiter de mes petits enfants ! Tout cela sera réalisable. Mais douze ans, cela me paraît long ! En plus, ma femme (ou mon mari 😉 ) sera à la retraite deux ans avant moi. Est-il possible de financer une retraite anticipée ? Et si oui : à quel prix ?

Si vous vous reconnaissez dans ces quelques lignes et que vous avez la petite ou la grande cinquantaine, il vous reste quelques années de travail avant votre retraite. Notez que c’est la dernière période de votre vie où vous pouvez encore planifier votre retraite. C’est aussi le meilleur moment pour financer votre départ anticipé. Car oui, partir plus tôt coûte de l’argent et il vaut mieux le planifier une grosse dizaine d’années en avance.

L’âge « ordinaire » de la retraite est fixé à 65 ans pour les hommes et à 64 ans pour les femmes. Toutefois, le droit de notre pays, fidèle à son esprit libéral, vous permet de partir cinq ans plus tôt ou cinq ans plus tard.

Dans la réalité, ces cinq années ne signifient pas grand-chose. Entendez-les plutôt comme une généralité où chaque pilier s’inscrit avec ses propres règles, ses avantages et ses inconvénients.

Je vous propose de vous fournir, dans les prochains articles, les notions essentielles des trois piliers sur la retraite anticipée au travers d’un cas concret pour mieux saisir les coûts et les points auxquels prêter attention.

Je remercie Patrick pour son coup de main.

Luc et Marie ont la cinquantaine et aimeraient prendre une retraite anticipée.

Nous allons prendre le cas d’un couple marié : Luc et Marie, qui sont respectivement dans leur 53e et 54e année. Du fait du départ à la retraite décalé entre les hommes et les femmes (65 et 64 ans) et de leur différence d’âge, Marie aura 64 ans lorsque Luc en aura 63.

Luc souhaite partir à la retraite la même année que Marie, soit deux ans avant l’âge de 65 ans. C’est dans dix ans.

Étant donné qu’il existe un nombre quasi infini de solutions pour financer ces deux années de retraite anticipée, je me bornerai à n’en présenter qu’une seule : la plus simple à mettre en œuvre. Ce ne sera pas forcément la meilleure dans votre situation.

Sachez également qu’en vous faisant accompagner par un conseiller financier, vous pourrez grandement améliorer le modèle qui va suivre. Vous pourriez améliorer les coûts, les charges fiscales ainsi que le revenu perçu ! Prenez cet exemple comme une base de réflexion pour votre situation. J’évoquerai des pistes alternatives sans rentrer dans les détails tout au long de l’article.

Aidez-vous d’un graphique pour mieux expliquer votre situation.

L’AVS vous fournira le minimum vital.

À l’image de beaucoup de couples, Luc et Marie ont travaillé toute leur vie. Marie a toutefois eu une carrière coupée après la naissance des enfants, suivie de travails à temps partiel.

La rente AVS de Marie s’élèvera probablement (il reste dix années de travail…) à 1’555.- francs par mois, tandis que celle de Luc se monterait au maximum possible de 2’370.- mensuel.

Premier constat ici : s’ils travaillaient jusqu’à l’âge ordinaire, notre couple aurait droit à la rente de couple AVS maximum et plafonnée de 3’555.- par mois, et ce dès les 65 ans de Luc.

En effet et bien que la rente AVS soit versée individuellement : lorsque deux personnes mariées sont à la retraite, les rentes s’additionnent, mais sont plafonnées à ce montant de 3’555.- (chiffres de l’année 2020).

En anticipant sa retraite de deux années, la rente de Luc diminuera de 13,6%, et ce pour le reste de sa vie. Le montant qu’il percevra sera donc de 2’047.- par mois. Vous trouvez plus de détail dans le mémento de l’AVS ici.

De plus, il devra cotiser à l’AVS jusqu’à ses 65 ans en tant que personne sans activité lucrative. Le montant de la cotisation sera basé sur l’ensemble des rentes qu’il perçoit (premier pilier, deuxième pilier, revenus divers) ainsi que sur le montant de sa fortune. Admettons pour notre exemple que Luc cotisera environ 3’400.- par année à l’AVS.

La retraite anticipée d’un conjoint impacte la rente de couple.

In fine, et aux 65 ans de Luc, la rente de notre couple sera abaissée à 3’263.- mensuel « ad vitam aeternam » et au plus tard jusqu’au décès de l’un des partenaires. Ce point nécessiterait un autre article… Leurs rentes individuelles seront de 2‘147.- pour Luc et de 1’408.- pour Marie.

Cherchons brièvement à comprendre comment les rentes sont calculées par l’AVS : c’est le simple résultat d’un produit en croix. Pour une retraite non anticipée et comme nous l’avons vu plus haut, Marie aurait le droit à une rente de 1’555.- mensuel tandis que Luc percevrait une rente de 2’370.- par mois. La somme des rentes s’élevant à 3’925.- et étant supérieure à la rente de couple de 3’555.-, l’AVS réalise le calcul suivant pour limiter les rentes individuelles : 2’147.- = 2‘370.- X 3’555.- / 3’925.- pour Luc et 1’408.- = 1’555.- X 3’555.- / 3’925.- pour Marie. En additionnant 2’147.- et 1’408.- vous obtenez 3’555.-. Pour arriver à la rente de couple (anticipée) de 3’263.-, la rente de Luc est minimisée de 13,6% correspondant aux deux années d’anticipation.

Le coût de la retraite anticipée s’élève donc à 292.- par mois (3’504.- par année). Avec une espérance de vie statistiquement estimée à 80 ans, le manque à gagner serait en théorie de 59’568.- hors inflation.

**Astuce**

Vous pouvez « prendre votre retraite » à 63 ans sans anticiper votre rente AVS. Il faudra également payer votre cotisation AVS en tant que personne sans activité lucrative, mais vous n’aurez pas ce trou de 13.6% ad vitam æternam.

Il faudra toutefois anticiper ses deux années pour combler ce manque à gagner de 2’147.- mensuel correspondant à plus de 50’000.- sur deux ans. Dans le cas de Luc, ce n’est pas très pertinent (50’000.- VS deux années à 3’504.- additionnée de la cotisation AVS de 3’400.-), mais pour des revenus AVS plus faibles ou pour une personne seule, le calcul peut valoir la peine !

Comment combler la lacune de la rente AVS anticipée ?

En se souciant de cette question dix ans en avance, Luc et Marie ont le temps de préparer et de combler ce « trou » sans trop impacter leur train de vie. Avec une hypothèse de rendement de 4% par année, ils pourraient épargner et investir 600.- par mois au travers d’un 3e pilier afin de former un capital de 87’000.- pour leur retraite anticipée. Ce capital pourra ensuite être consommé à raison de 3’504.- par année.

Vous trouvez ici la suite de cet article qui traite du deuxième pilier.

L’un de vos collègues réfléchit à une retraite anticipée ? Envoyez-lui cet article et dites-lui de me contacter à raphael.battu@maretraite.ch 😉