Dans les articles précédents sur l’AVS et le deuxième pilier, nous avons vu, à travers l’exemple de Luc et de Marie, la perte à laquelle notre couple peut s’attendre en anticipant de deux ans leur retraite. Voyons maintenant comment ils peuvent planifier leur retraite pour faire face à ces défis.
Pour
rappel, Luc et Marie ont actuellement 53 et 54 ans. Du fait de leur différence
d’âge, Luc aura 63 ans lorsque Marie en aura 64. L’idée de Luc est de prendre
sa retraite deux ans en avance sur la retraite ordinaire de 65 ans afin qu’ils
puissent commencer à profiter en même temps de leur « nouvelle vie ».
Dans
les grandes lignes, et en procédant ainsi, l’AVS et le deuxième pilier de Luc
seront amputés de 13,6% par rapport à la retraite légale, et ce, à vie. Nous
avons également vu que le revenu de notre couple à la retraite sera équivalent
à moins de 50% de leur revenu actuel (16’700.- francs bruts aujourd’hui contre
7’806.- demain).
Notez que même si Luc ne prenait pas de retraite anticipée, et bien qu’ils aient tous les deux travaillé et cotisé toute leur vie, leur revenu de retraite serait proche des 50% de leur revenu actuel ! Une bonne raison pour planifier sa retraite à l’avance.
Heureusement, Luc et Marie anticipent de dix ans leur retraite, ce qui leur laisse le
temps de planifier un atterrissage « en douceur ». Tentons de voir
ici, comment Luc et Marie pourraient se préparer efficacement à cette baisse
soudaine de revenu.
Revenu versus train de vie
En
planifiant votre retraite, vous devez chercher des chiffres de référence pour y
voir clair et pour trouver la bonne direction.
Dans
le cas de Luc et de Marie, nous connaissons deux chiffres intéressants :
leur revenu actuel de 16’700.- mensuel et leur revenu probable de retraite de
7’806.-.
À
votre avis, quelle autre donnée pourrait les aider à combler leur lacune de
revenu à la retraite ?
C’est
leur train de vie ou autrement dit, leur budget. Ils ne dépensent pas
forcément ce qu’ils gagnent : épargne, impôts, charges sociales… autant de
« dépenses » qui n’auront pas le même poids à la retraite.
Faire
un budget est primordial lorsque l’on planifie sa retraite. Et bien que la vie soit
remplie de surprise, il existe toute une série de charges fixes ou peu
variables qui sont facilement identifiables.
À
vrai dire, le budget est la pierre angulaire, à tout âge, d’une bonne
planification financière.
Tentons
maintenant de mettre en lumière ces dépenses.
Les charges encore présentes à la retraite.
L’un
des postes que notre couple continuera de payer à la retraite est l’assurance
maladie. Vous pouvez prendre vos factures actuelles et les augmenter du
chiffre exorbitant de 4,12% par année d’ici à votre retraite.
Avec le vieillissement de la population, l’augmentation sera probablement plus élevée encore. Je me suis contenté de prendre l’inflation des primes de la LAMal entre 1999 et 2019 sur le site de l’Office fédéral de la statistique.
Pour
vous donner un ordre d’idée : si vous payez 8’400.- par année aujourd’hui pour
la LAMal et les complémentaires, vous payerez demain 12’600.-. Il faut également
ajouter pour un grand nombre de complémentaires les paliers d’âges propres à
chaque assureur.
Pour vos autres dépenses courantes comme les assurances choses, vos courses, les habits, le loyer si vous êtes locataire, les frais de votre maison si vous êtes propriétaire, l’énergie, les communications… vous pouvez prendre vos chiffres actuels et appliquer une inflation de 1,1% par an (inflation officielle moyenne des 40 dernières années. 100.- aujourd’hui vaudra 111.- et des poussières dans dix ans).
Si
vous êtes propriétaire,
vous devriez avoir les moyens d’effacer votre dette à la retraite. Aussi, vous
avez peut-être actuellement la possibilité de renégocier pour longtemps et
au-delà de votre retraite, votre dette hypothécaire. Prenez votre coût renégocié.
Par prudence, et si vous n’avez pas la possibilité de changer votre charge d’intérêt, vous pouvez prendre le taux hypothécaire moyen historique de 4,5%. Ce taux sert de référence aux prêteurs (banques et assurances) pour le calcul de la faisabilité hypothécaire.
**Astuce hypothécaire**
Je
peux vous proposer en ce moment des taux exceptionnels aux environs de 1% sur
25 ans, avec une quasi-absence de contrainte en cas de résiliation avant
l’échéance. C’est
de mon point de vue révolutionnaire dans le monde suisse de l’hypothèque et
cela permet de planifier sereinement l’effacement de sa dette.
Contactez-moi si vous
souhaitez en discuter raphael.battu@maretraite.ch
Les charges qui disparaîtront ou qui seront diminuées à la retraite :
En
réalisant votre budget, vous identifierez également des charges qui n’auront plus
lieu d’être. Ce sont les dépenses liées au travail comme les charges
sociales, les frais de voiture ou les abonnements de transports publics ou les
frais liés aux enfants qui auront quitté la maison.
Les
autres « dépenses » que vous pourrez éliminer concernent votre
épargne. En effet, si vous avez vécu suffisamment prudemment, vous n’aurez
plus à rembourser de dette immobilière. De fait, l’amortissement de la dette
hypothécaire, et vos troisièmes piliers seront clos.
Enfin, les impôts ne seront plus basés sur votre revenu du travail (16’700.-
mensuel pour Luc et Marie), mais sur votre nouveau revenu de retraite (7’806.-
dans notre exemple).
Attention
toutefois à ne pas les sous-estimer : beaucoup de dépenses ne seront plus
déductibles :
épargne en 3e pilier, rachat de 2e pilier, dépenses liées
à l’activité professionnelle, présence des enfants à la maison, etc. Luc et
Marie payeront vraisemblablement plus de 1’100.- d’impôts par mois sur Lausanne
(!) en l’absence de fortune. Leur taux moyen d’imposition passera de 19% à 14%.
Les nouvelles dépenses de retraite à planifier.
A
contrario de ce que nous venons de voir et selon le mode de vie que vous
choisirez, de nouvelles dépenses pourront s’ajouter. Elles sont cependant
difficiles à prévoir.
Vous
aurez probablement 50% de revenu en moins, mais 100% de temps en plus qu’il faudra bien occuper.
Passer
du temps avec vos petits-enfants, au théâtre ou au musée ne vous coûtera pas
excessivement cher. Il n’en sera pas de même pour les voyages, la location d’un
appartement (si vous vendiez votre maison par exemple) ou la location d’une
résidence secondaire qu’il faudra anticiper.
**Astuce**
Si
vous vous êtes habitué tôt à vivre avec 80% de votre revenu net, il sera facile
de passer la marche de la retraite sans consommer votre épargne trop
rapidement.
Vous
pourriez vous passer d’un budget dans le cas où vous décideriez volontairement
d’épargner 20% à 30% de votre revenu, tout au long de votre vie, et ce quoiqu’il
arrive.
Si vous cherchez à acquérir l’indépendance financière, vous pourriez adopter un mode de vie un peu plus frugal que la moyenne de vos contemporains en épargnant jusqu’à 40%, voir 50%… de vos revenus. En investissant cette épargne, vous gagnerez tôt en liberté financière.
Effacer sa lacune de retraite
Luc
et Marie ont réalisé leur budget et ont identifié que sans leurs enfants, ils
dépenseront environ 9’000.- par mois, soit 1’200.- de plus que ce qu’il est
prévu de gagner (7’806.-).
Grâce
aux taux hypothécaires actuellement bas, ils décident de figer leur loyer sur
25 ans soit jusqu’à leurs 80 ans. Leur dette leur coûtera environ 500.- par
mois. Une belle économie de réalisée si l’on regarde les 1’300.- qu’ils
payaient jusqu`à aujourd’hui.
La
combinaison de ces éléments leur permet dès lors d’épargner 2’500.- par mois
(30’000.- par année) et ce malgré la présence des enfants aux études supérieures
(ils ont commencé à épargner dès la naissance des enfants pour ce poste).
Notons
que leur maison des années 60 aura probablement des frais importants dans les
années qui viennent (chaudière, façade). Ce poste est également à planifier.
Planifier sa retraite et structurer son épargne.
Notre
couple décide de maximiser les économies d’impôts et va répartir son épargne
sur trois axes à raison de 10’000.- par poste (30’000.- d’épargne divisée par 3
postes = 10’000.-)
Réaliser des travaux dans sa maison.
Tout
d’abord, ils vont garder des liquidités pour faire face aux travaux de la
maison en y consacrant 10’000.- par an.
Avec
cette épargne de 120’000.- sur dix ans, ils pourront changer la chaudière,
refaire les façades et améliorer quelques pièces comme la cuisine et les salles
de bain. Grâce aux économies d’impôts qu’ils réaliseront au fur et à mesure des
années, ils pourront garder une réserve supplémentaire pour d’éventuels aléas
ou travaux dans plusieurs années.
En
procédant ainsi, et en mettant à jour leur maison, ils se donnent la possibilité
de revendre leur bien assez facilement et pourraient donc changer leurs plans à
tout moment.
Racheter son deuxième pilier.
Planifier sa retraite passe souvent par le rachat du deuxième pilier. Luc et Marie ont la possibilité de racheter 120’000.- sur leurs caisses de pension. Cela tombe bien, car racheter sa caisse de pension dans les 10 dernières années de sa vie active est très intéressant en ce qui concerne les économies d’impôts et le rendement.
Ils
pourront donc consacrer 10’000.- de leur épargne annuelle pour les rachats.
Ici,
il faut distinguer la partie d’épargne qui ira dans la partie obligatoire LPP (qui
servira une rente à 6,8%) de la partie qui ira dans le surobligatoire (servant
une rente plus faible de 5,25%).
Grâce
à ces rachats, ils augmenteront leur revenu de retraite de 500.- par mois.
Notez
aussi que l’économie d’impôt qui résultera de ce rachat se montera à 3’500.-
par année (!) soit 35’000.- sur dix ans.
Maximiser son 3e pilier « A ».
Qu’est-ce que planifier sa retraite sans le 3e pilier ? Luc et Marie mettront le maximum déductible en 3e pilier « A ». En 2020, chaque salarié affilié à un deuxième pilier a le droit d’épargner 6’826.- par année sous la forme d’un troisième pilier lié à la retraite. Ils pourront mettre 13’652.- sous cette forme chaque année.
Pour
se faire, ils consacreront les 10’000.- d’épargne disponible additionnée des 3’500.-
d’économies d’impôts réalisées grâce aux rachats des deuxièmes piliers.
Cerise
sur le gâteau, cette structure d’épargne leur apporte encore 4’400.- d’économie
d’impôt supplémentaire ! En combinant le rachat du deuxième pilier et
l’épargne en 3e pilier, ils réaliseront chaque année près de
8’000.- d’économie d’impôts soit 80’000.- sur dix ans. À laquelle il faudra
ajouter les économies réalisées grâce aux travaux dans la maison.
Ils
privilégieront des comptes de 3e pilier bancaires et investis afin
de viser un rendement faible, mais conservateur aux environs de 2,5% moyen
annuel.
À
leur retraite, cette épargne se montera aux environs de 136’000.- net d’impôts
et leur apportera environ 600.- par mois de revenu supplémentaire.
**Astuce**
Lors
du retrait du capital de 3e pilier, un impôt « de sortie »
sera prélevé. Afin de casser la progression fiscale et de baisser cet impôt, Marie
(ou Luc) retirera son 3e pilier une année avant sa retraite.
Ils
économiseront ainsi 25% de cet impôt de sortie !
Un arrêt récent (2019) du tribunal fédéral confirme et valide cette pratique 🙂
Un plan d’épargne en fonds flexible
Enfin, le solde des économies d’impôts réalisées d’environ 400.- mensuel sera épargné dans un plan d’épargne en fonds. Notre couple pourrait aller chercher 3% ou 4% de rendement par an.
Planifier sa retraite peut aussi passer par une épargne libre, flexible et disponible à tout moment.
Luc
et Marie pourront également verser à leur bon vouloir dans ce plan la réserve
non dépensée des travaux de la maison.
Cette
épargne supplémentaire de 400.- mensuel représentera environ 55’000.- grâce à
laquelle ils pourront augmenter leur revenu de retraite de plus ou moins 200.-
par mois.
Le résultat de cette planification retraite
En
maximisant leur épargne, leurs économies d’impôts et tout en cherchant le bon
compromis entre le rendement et le risque, leur lacune de retraite de 1’200.-
sera allégrement comblé.
De
plus, leur maison sera dans un état impeccable, ce qui leur permettra de garder
toute la flexibilité et la liberté dont ils pourront avoir besoin.
Une
bonne planification doit rester flexible, mais être volontaire. Chaque
situation est unique. Faites-vous accompagner par un conseiller financier pour
ne rater aucune économie d’impôt et planifier correctement votre retraite 😉
Vous
avez aimé cet article ? Faites-le savoir en le partageant à votre
entourage !