Dans un couple marié et en cas de décès d’un conjoint, la continuité de la tenue des charges de la maison familiale est posée. En effet, avec la disparition d’un revenu, le fameux ratio des charges immobilières, qui ne doit excéder le tiers du revenu, est souvent dépassé et une expulsion n’est pas à exclure.
Et bien que le premier et le deuxième pilier servent des rentes de veuf ou de veuve, ces dernières peuvent se révéler insuffisantes au maintien de ce ratio.
Notez que les couvertures du système social suisse sont différentes dans le cas d’une maladie et d’un accident. Comment peut-on se protéger d’un tel événement ? Je vous propose un bref rappel théorique suivi d’un cas pratique pour illustrer mes propos.
Les rentes de veuve et de veuf en cas de décès du conjoint à la suite d’une maladie
En comparaison avec l’accident, décéder à la suite d’une maladie est le cas statistique le plus fréquent. Que prévoient les assurances sociales dans le cas du décès par maladie d’une personne salariée ?
Les deux premiers piliers (AI et LPP) peuvent fournir, sous certaines conditions, des revenus de substitution au partenaire survivant. Vous trouvez un article qui en parle ici.
Le prêteur hypothécaire exige en tout temps que le revenu de la famille soit au moins trois supérieurs à l’ensemble des charges théoriques du bien. Y compris après un tel drame.
Ces charges sont formées de l’entretien du bâtiment, du remboursement de la dette et des charges d’intérêts hypothécaires.
Le premier pilier verse au conjoint et, sous certaines conditions, jusqu’à 80% de l’ancien salaire avec un plafond situé à 22’752.- francs par an. En cas de lacunes de cotisation ou de revenu faible les premières années de l’activité lucrative, cela peut aussi être beaucoup moins.
La rente de conjoint du deuxième pilier quant à elle varie grandement selon la caisse de pension du défunt. Un employeur qui offre des prestations sociales intéressantes peut servir jusqu’à l’intégralité du revenu sous forme de rente ou de capital. À l’inverse, un patron radin pourrait servir le minimum selon la Loi sur la Prévoyance Professionnelle (LPP).
Si vous êtes employé dans une entreprise de taille relativement importante, vos chances d’influer sur ces rentes seront limitées. Cela vaut toutefois la peine de vous rapprocher de votre représentant salarial pour le deuxième pilier afin d’obtenir de bonnes couvertures.
Les rentes de veuve et de veuf en cas de décès à la suite d’un accident
Dans le cas d’un accident, c’est la Loi sur l’Assurance Accident (LAA) qui servirait une rente au conjoint survivant.
La LAA assure les salariés qui travaillent plus de huit heures par semaine avec un revenu inférieur à 148’200.- par an. La rente de conjoint est limitée à 40% de l’ancien revenu. Ici aussi, un employeur généreux peut faire mieux que la loi. Renseignez-vous.
La rente de conjoint selon la LAA est également servie sous certaines conditions (mariage, enfant en commun, etc.).
Le premier pilier apporterait parallèlement une rente au conjoint survivant, dans les mêmes conditions que pour la maladie.
Enfin, la caisse de pension peut fournir si son règlement le permet, un complément de revenus sous forme de rente ou de capital.
Le cas de l’indépendant
Une personne qui travaille à son propre compte n’a pas l’obligation de s’affilier à un deuxième pilier, à un troisième pilier ou à la LAA. Elle est donc libre de composer sa prévoyance sur mesure. La liberté qui en découle est intéressante pour construire une prévoyance avantageuse, mais cela peut aussi se révéler être à double tranchant.
En effet, par manque de temps et d’intérêt, trop d’indépendants repoussent à « plus tard » l’étude complète de leur situation. Tant que tout va bien…
De mauvais conseils peuvent aussi conduire à une situation bancale. En quelques heures, et avec l’aide d’un conseiller expérimenté, vous pourriez combler l’ensemble des lacunes de retraite, d’invalidité et de décès.
En l’absence de couverture complémentaire, seules les rentes du premier pilier seraient servies. Cela peut amener la famille à une situation dangereuse autant pour éviter l’expulsion de la maison que pour continuer à vivre « normalement ».
Les rentes d’orphelin
Le premier pilier, le deuxième pilier et la LAA versent des rentes aux enfants survivants. Ces rentes d’orphelins correspondent respectivement à 40% (AI), 20% (LPP) et 15% (LAA) de la rente de conjoint.
Certains prêteurs immobiliers pourront considérer ces rentes comme faisant partie intégrante du revenu de la famille et d’autres les excluront.
Notez qu’un tuteur pourrait également en limiter l’utilisation jusqu’à la majorité des enfants. Dans tous les cas, je vous invite à protéger votre famille devant un notaire en rédigeant des testaments et un contrat de mariage. Vous trouvez plus de détails sur ce sujet ici.
Quand après un décès la faisabilité de la maison devient impossible à tenir ! Un cas pratique
Pour comprendre les conséquences d’un décès sur la faisabilité hypothécaire de la maison, prenons l’exemple d’un couple qui gagne 180’000.- par année, à parts égales soit 90’000.- chacun.
La famille est également composée de deux enfants. Les parents sont assurés dans la moyenne suisse et ils sont propriétaire de leur appartement acheté 1’070’000.- il y a quelques années.
Lors de l’achat, ils ont contracté une hypothèque de 856’000.- et leur faisabilité était au maximum possible de 33%. C’est-à-dire que l’ensemble des charges théoriques calculées par le prêteur se montait à 60’000.- par an (60’000.- fois 3 = 180’000.-).
Dans le cas où l’un des époux viendrait à disparaître, le conjoint survivant et les enfants toucheraient aux environs de 54’000.- par année. Ainsi, le nouveau revenu de la famille passerait à 144’000.-. Dans ce cas, et à condition que le prêteur prenne en compte les rentes d’orphelins, la faisabilité passerait de 33% à 42% (60’000.- divisé par 144’000.-). Notez que si le prêteur excluait de son calcul les rentes d’orphelins, la faisabilité exploserait à près de 50%.
Ici, la banque ou l’assurance qui aurait prêté l’hypothèque, serait en droit de demander des garanties supplémentaires à hauteur de 273’000.-.
Cela signifie que pour éviter une vente forcée du bien, la famille devrait apporter 273’000.- de garanties supplémentaires au prêteur. Cette somme pourrait prendre plusieurs formes : des liquidités, un portefeuille d’investissement ou, pourquoi pas, la caisse de pension du conjoint survivant.
Étant donné que la majeure partie de la fortune des Suisses est composée de la caisse de pension et des fonds propres de la maison familiale, cette somme soudainement nécessaire n’existe tout simplement pas.
Alors, comment éviter d’ajouter de la difficulté financière à de la peine ? Voyons cela.
Ajouter un capital décès grâce à un 3e pilier assurance permet de conserver la maison
Rester libre d’un système et libre de la dette contractée pour acheter sa résidence principale me semble pertinent.
Beaucoup de pays en Europe obligent les contractants d’une dette immobilière à assurer le cas du décès. La Suisse ne l’oblige pas et le prêteur l’exige rarement. Mais ce n’est pas parce qu’on ne vous le demande pas qu’il ne faut pas le faire. 🙂
Une façon assez simple pour notre couple suisse de se protéger pourrait être de contracter une assurance de 3e pilier et d’y inclure un capital décès afin d’être en mesure, en tout temps, de conserver la maison.
Avec l’aide d’un conseiller financier, notre famille pourrait calculer son besoin exact et se couvrir en conséquence tout en évitant une sous assurance ou une sur assurance.
Elle devrait idéalement ajouter à ce capital décès les nouvelles dépenses consécutives à la perte d’un conjoint.
Enfin, notre couple serait bien avisé de profiter de cette analyse pour combler ses lacunes de retraite, surtout dans un système qui part à la dérive.
Un conseil sur mesure s’applique ici. Pensez à revoir votre situation régulièrement !
Notez que s’assurer n’exclue pas le fait d’épargner pour rembourser sa dette.
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